27 octobre 2014
Des problèmes
de taille pour les cercueils On a relu le rapport trois fois, croyant avoir la berlue. Mais non, Frédéric Bertrand qui a piloté cette étude menée en 2010 dans les cimetières autour de Paris, confirme : «Il y a un réel problème de dimensions desconcessions dans les cimetières. Surtout, pour les vieilles chapelles du XIXe siècle.» Elles sont souvent trop étroites et plus suffisamment longues pour accueillir des cercueils à la taille d’aujourd’hui. Rien de plus logique, en fait. Avec le temps, l’espèce humaine gagne des centimètres, et les monuments funéraires datant de l’époque napoléonienne ne sont plus adaptés à nos gabarits. Quand c’est faisable, les fossoyeurs cassent les bords de la sépulture pour faire passer le cercueil. Et rafistolent derrière, ni vu ni connu. Parfois, la famille n’a d’autre choix que d’acheter une nouvelle concession dans la partie neuve du cimetière. Mais là aussi, des problèmes commencent à se poser. «Regardez les règlements : la plupart du temps, les concessions font un mètre sur deux. Si le défunt mesure 1,90 m, le cercueil dépasse les deux mètres de long… Si la commune n’a pas prévu de marge, ça peut coincer», explique Michel Kawnik, président d’une petite association d’information funéraire, sur pied depuis 1992. A l’entendre, ce problème n’est pas si anecdotique qu’on pourrait le penser. «Il y a parfois des scandales le jour des enterrements. En principe, les entreprises de pompes funèbres vont ouvrir le caveau la veille pour vérifier justement ce genre de chose. Mais si vous tombez sur une entreprise peu professionnelle, cela peut virer à une situation ubuesque.» LES APPAREILS DE CRÉMATION, PAS TOUS ADAPTÉS En optant pour l’incinération, se dit-on, on s’évite bien des ennuis… Conclusion un peu rapide. Là encore, mieux vaut être petit. Les crématoriums n’acceptent pas tous les cercueils, lorsqu'ils sont plus lourds et plus larges que la moyenne : passés les 140 kilos, ou au-dessus de 85 cm de large. «Très peu sont équipés de grands fours, celui attenant au cimetière communal de Coeuilly de Champigny-sur-Marne, fait exception et reçoit des corps de toute la France», pointait l’Atelier parisien d’urbanisme (Apur) dans son rapport de 2010. Samuel Sauzet, responsable du crématorium de Champigny, confirme : «C’est vrai, oui, même si depuis deux ou trois ans, beaucoup de crématoriums ont modernisé leurs appareils pour s’adapter à la demande. Mais il arrive encore que des familles soient obligées de faire 300 ou 400 kilomètres pour venir incinérer leur proche. Ça leur coûte cher.» A Champigny, cette situation se présente encore aujourd’hui trois ou quatre fois par mois, sur les 90 incinérations en moyenne. «C’était une volonté de notre part, dès la création de notre structure en 2007, de répondre à cette demande, explique Samuel Sauzet. On s’était rendu compte du problème au crématorium du Père Lachaise, qui est de taille standard. Le service funéraire de la ville de Paris [une société d’économie mixte, ndlr] voulait apporter une réponse, on l’a donc inclus dans le cahier des charges pour le constructeur.» A l’écouter, on comprend qu’il ne s’agit pas d’une bête question de production industrielle des appareils. «Bien sûr, à l’achat, ça coûte un peu plus cher. Mais ce n’est pas la seule raison : si certains crématoriums refusent, c’est à cause des durées de crémation. Pour les personnes de forte corpulence, il faut plus de temps. Jusqu’à 2 heures et demie voire 3 heures, contre 90 minutes pour un gabarit classique.» Tout dépend donc de l’établissement, et de ses objectifs de rentabilité. En France, sur les quelque 160 crématoriums répertoriés, la moitié est gérée par des entreprises privées, sur délégation de service public. Marie PIQUEMAL |